Presque 30 ans de célibat : est-ce si étrange que ça ?
épisode 1 : une réflexion en toute transparence sur mon éternel célibat
Et voilà, on démarre fort avec ce premier épisode ! Être à l’aube de la trentaine sans jamais avoir été en couple, ni expérimenté le plaisir à deux (ou à plusieurs, ici, zéro jugement)… c’est pas banal, non ? Ou peut-être que si, allez savoir. Alors, qu’est-ce que ça fait, à l’âge où certains jonglent entre mariages, prêts immobiliers et poussettes, de se trouver à des années-lumière de ce scénario ? Allez, c’est parti pour une petite introspection sur ce célibat qui joue les prolongations.
Le fantasme de l’amour
J’aspire à de longues discussions jusqu'à tard dans la nuit. Le genre de conversation où je peux parler de tout et de rien avec quelqu’un et que même si je suis fatiguée, je ne veux absolument pas m’endormir. Je veux juste continuer à lui parler jusqu'au petit matin, parce que discuter avec cette personne me fait me sentir plus vivante que je ne l'ai jamais été. Je veux construire ce genre de lien émotionnel avec quelqu'un. Je veux savoir ce que c'est que d'être aimé et de partager un lien intime avec quelqu'un à qui je tiens. J'attends quelqu'un qui verra le vrai moi et qui m'aimera toujours pour celle que je suis. J'attends quelqu'un qui bouleversera toute mon existence, qui me fera ressentir un tourbillon d'émotions, et qui fera palpiter mon cœur avec seulement un sourire. Je me demande s'il y a quelqu'un pour moi, là-bas, quelque part et qui attend que la même chose se produise…
J'ai écrit ces lignes il y a quelques années, et je me rends compte aujourd'hui que ce portrait semble bien naïf. Au fond, il est possible que j’aie encore cette vision un peu candide des relations amoureuses, sans doute parce que je m’accroche encore à l’image que j'en avais à l’adolescence. À 29 ans, mis à part les histoires que mes amis m'ont racontées et les fictions des films, je n'ai littéralement aucune idée de ce que c’est qu’être dans une relation. Alors, pourquoi en ai-je tellement envie ? Pourquoi ai-je envie d’être en couple alors que je ne sais même pas quel effet cela aurait sur ma vie ou sur moi-même ? La réponse est simple : l'amour est partout, érigé en une sorte de Saint Graal à atteindre absolument pour entrer dans la soi-disant normalité. C'est ce que la société nous projette : tomber amoureux, être en couple, se marier, avoir des enfants, etc. Des cases à cocher, toujours et encore… Bien entendu, être en couple ne devrait pas être une fin en soi, mais il n’empêche que c’est quelque chose que j’aimerais expérimenter pour enfin savoir ce que ça fait.
Célibataire depuis toujours (ou presque)
Pourquoi “presque” ? Il y a environ trois ans, j’ai fait la connaissance d’un homme sur une application avec qui le feeling est bien passé. Bien sûr, comme rien n’est jamais facile, il vivait sur un autre continent. Les choses se sont faites plutôt naturellement et nous nous sommes rapidement considérés comme un couple. Avec le recul, cette relation n’était guère plus qu’un fantasme. Pour moi, c’était enfin la preuve que je pouvais plaire à quelqu’un, chose dont j’ai longtemps douté, et pour lui, probablement d’être en couple avec une étrangère. Comme vous pouvez l’imaginer, cette relation n’a duré que deux mois, sans projet d’avenir concret. Il a fini par me ghoster du jour au lendemain, et j’ai appris par la suite qu’il m’avait trompée avec une de ses collègues. On ne fait pas plus cliché, n’est-ce pas… Alors, tant d’années sans avoir vécu de relation amoureuse et aucune relation sexuelle, qu’est-ce que ça fait concrètement ? Pour être tout à fait honnête, mon ressenti ne cesse de changer.
Il y a des moments où je n’y pense pas vraiment et d'autres où je ressens un manque de quelque chose que je n'ai pourtant jamais expérimentée. Parfois, il m’arrive de comparer ma situation à celle des autres et je me sens complexée en réalisant que des personnes beaucoup plus jeunes que moi ont sans doute plus d’expérience. J’ai alors l’impression que ces gens savent quelque chose que je ne sais pas, et que je suis exclue d’un club spécial dont beaucoup sont déjà membres. Depuis aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été dans cette quête de l’amour. Quand j’étais plus jeune, j’avais honte de n’avoir jamais été en couple, ou du moins que mes sentiments n'aient jamais été réciproques. Je n’ai jamais connu les petites amourettes d’école, et ça m’a pas mal complexée à une époque. Avec le temps, des questions ont commencé à se bousculer dans ma tête : peut-être qu'il y avait quelque chose qui clochait chez moi, et peut-être que je ne méritais tout simplement pas d'être aimée. Ces doutes ont alors ébranlé le peu de confiance en moi que j’avais— comme si j’avais besoin de ça….
N’avoir aucune expérience à presque 30 ans, la honte ?
Nous vivons dans une société où le fait d'être en couple est un cap que tout le monde est censé avoir franchi, dépassé la vingtaine. Certaines personnes semblent surprises lorsque vous leur dites que vous n’avez jamais eu de relation de toute votre vie. Dans mon cas, on me demande souvent s’il y a une raison. Avec du recul, je pense que ce sont mon manque de confiance en soi, ainsi que mon rapport au corps, qui ont été un gros frein. En effet, les moqueries sur mon corps dont j’ai été victime à l’adolescence m'ont beaucoup affectée et m'ont convaincue que mon corps ne méritait pas d'être aimé. Évidemment, même si c'est encore difficile aujourd’hui, je prends peu à peu conscience que je suis plus qu’un corps et que celui-ci ne devrait pas être un obstacle à ma vie amoureuse.
L’amour et le sexe derrière un écran
On le sait, tout est plus facile derrière un écran, mais c’est aussi paradoxalement plus risqué. Je reconnais que j’ai tendance à me réfugier dans le monde virtuel, où l’on peut plus ou moins contrôler ce qu’on choisit de montrer de soi. Une des raisons pour lesquelles j’aime flirter en ligne, c’est pour me prouver à moi-même que je peux séduire un homme. Quand un homme me dit que je suis sexy, c’est comme recevoir cette validation que j’ai toujours tant désiré. Mais d’un certain côté, je réalise qu’il y a aussi une certaine tristesse à dépendre de cette approbation masculine. Que voulez-vous, mon manque de confiance en moi a toujours eu le dessus dans ma vie— hmm, ça sent le sujet pour le deuxième episode, qu’en dites-vous ?
Quand je flirte avec des hommes sur Internet, je ne vois pas l’intérêt de mentir et je reste toujours honnête quand la conversation glisse vers le sexe.
– Qu’est-ce qui te fait kiffer ?
– Je ne sais pas trop, car en fait, j’ai pas vraiment d’expérience…
Au début, la plupart d'entre eux sont un peu surpris d'apprendre que je n’ai aucune réelle expérience, surtout à mon âge, mais ils se montrent compréhensifs, et j'apprécie leur bienveillance (ça devient si rare de nos jours). En réalité, mes seules “expériences” se résument à des rencontres en ligne : du flirt, des sextos et même… du sexe en visio. Et figurez-vous que c’était un grand moment pour moi. C’était la première fois que j’osais montrer mon corps à un homme et contre toute attente, je me suis sentie à l’aise et en confiance. C’était la première fois que je me sentais vraiment désirée pour ce que j’étais. Comme quoi, même le virtuel peut parfois offrir des moments bien réels.
Chaque parcours est différent
Cependant, je dois avouer que, plus le temps passe, plus la notion de sexe m’effraie. Ce n’est pas tant le sexe en lui-même qui me terrifie, mais plutôt le manque d’expérience que j’aurais par rapport à mon partenaire. La simple idée d'embrasser quelqu'un est une petite source d'angoisse. Il faut dire que la dernière fois que c'est arrivé, j'avais à peine dix-sept ans. Douze ans sans embrasser quelqu’un, ça fait long !
De plus, je n’ose pas plonger dans le grand bain de la dating scene. La raison ? J’ai l’impression d’avoir un énorme retard sur les personnes de ma génération, et j’ai peur de ne pas savoir comment m’y prendre. C’est comme si je n’avais pas acquis les codes sociaux que j’aurais dû apprendre et expérimenter bien plus tôt. Mis à part dans mon imagination débordante, j’ai du mal à m’imaginer dans une relation. Concrètement, c’est quoi être en couple ? Être amoureux, partager une vision commune, travailler ensemble pour atteindre un but ? J’ai l’impression d’avoir tant à apprendre sur ce sujet, alors que des gens de mon âge sont déjà mariés et ont des enfants. Et puis il y a moi, qui ne suis jamais sortie avec personne...
Cependant, je sais au fond de moi qu’il est essentiel de ne pas se comparer aux autres. Je sais aussi que ceux qui ont déjà de l'expérience ont parfois du mal à trouver la personne qui leur convient. Chaque parcours est différent, et même si nous vivons dans une société où l’amour et le sexe sont omniprésents, nous ne sommes pas des bêtes de foire si ces choses nous restent encore inconnues. C’est loin d’être une course, et dans mon cas, je préfère apprendre à m’aimer d’abord plutôt que de rester fixée sur mon célibat prolongé . Et puis, notre temps finira bien par arriver, non ?
J’espère sincèrement que ce petit aperçu de ma vie très personnelle vous a plu. En effet, je trouve vraiment important de mettre des mots sur des sujets dont on parle finalement peu et si je dois m’exposer pour le faire, so be it. À celles et ceux qui partagent une expérience similaire à la mienne : coeur sur vous ❤️
Tu envoies du lourd dès le premier épisode, et j’adore ça. Ton article pousse vraiment à la réflexion : sur soi-même, sur les autres, mais aussi sur ces drôles de préjugés et normes sociétales qui, bien souvent, encombrent notre esprit plus qu’autre chose. Tu as également parfaitement résumé une idée clé : chaque parcours est différent. C’est une vérité qu’on oublie trop facilement, et pourtant, garder ce concept si simple à l’esprit pourrait nous éviter bien des jugements, qu’ils soient envers nous-mêmes ou envers les autres. Ce serait tellement plus bienveillant. J’ai souvent l’impression d’être à la traîne sur plein d’aspects de la vie. Mais quand j’arrive à trouver le courage de ne pas sombrer dans cette spirale infernale, j’aime me rappeler le proverbe italien 'chi va piano va sano.' Ta plume est exquise.
Je te suis reconnaissante d'être transparente sur un sujet considéré comme tabou alors que chaque chemin est différent, propre à soi, à ses expériences, à ses complexes, à ses envies à un âge ou à un autre. L'idéal (l'injonction) de la coucherie à dix-sept ans, du mariage à trente et du gosse qui gesticule dans une maison achetée à crédit... Ce ne sont que des repères d'une pseudo-normalité, alors que nous sommes tous atypiques !
J'imagine que le souci, c'est si ce célibat devient subi, douloureux ?